Le liseur

Je lis le rose de vos joues et la chaleur de votre ventre. Je traduis comme bon me semble. Je compte les syllabes de vos cils qui se trémoussent. Je lis en suivant la ligne de la pulpe de mon index. Mes lèvres muettes prononcent les phrases en frémissant. Je me concentre sur le sujet puisqu’il me plait infiniment, tandis que vous vous laissez faire. Je lis, je lis, je peux relire aussi. Je tourne les pages sans me presser. Le désir vous enlace. Je ne saute aucun paragraphe, vous êtes la diagonale. Tandis que je souligne un passage, vous ouvrez votre bouche avaleuse de mots pas sages. Lettré fier, la plume à l’encrier, je vous observe. Vous comprenez mon style, j’aime votre poésie. Vos souffles me suggèrent de dévorer l’ouvrage. L’intrigue est palpitante, l’émoi s’étend. Je fais lecture d’une traite mais sans hâte aucune. Le récit sollicite mon imaginaire, vous êtes captive. Il invite à lire entre les lignes, j’exécute, habile liseur que je suis de vous. Attardons-nous à l’épilogue, à peine repus. Une œuvre en appelle une autre, devant mon thème tant aimé je suis confiant. Auprès de vous, mes lectures seront sans fin.